Pages

Friday 29 January 2016

REFER IF YOU MUST BUT KNOW YOUR REFERRAL

by Janet Michelin**

At some point in their practice, most lawyers have recommended other professionals or service providers to their clients. But are we liable if the person we recommended is negligent, or worse, a fraudster? The Court of Appeal examined that question in Harris (Succession de), 2016 QCCA 50. The Court upheld the trial judge’s decision that the lawyer had not committed a fault in recommending that his Estate client engage the services of an estate administrator, Earl Jones, who later defrauded the Estate. Full disclosure: I acted for the Respondent attorney and law firm in this case.

The Deceased Harris passed away in July 2007. In October 2007, the relatively inexperienced liquidator of the Estate consulted the Respondent attorney and mandated him to act on the Estate’s behalf. On October 24, 2007, in an effort to save the Estate legal fees for the relatively straightforward administration of the Estate, the attorney recommended that the liquidator engage the services of Earl Jones to assist him with the Estate administration. On December 12, 2007, the liquidator mandated Earl Jones to handle all administrative matters for the Estate, notably collecting the remaining Estate funds, paying the debts and distributing the assets to the heirs, the Deceased’s two young adult sons, both of whom who were intellectually disabled.

In June 2009, 21 months after the attorney’s recommendation, the liquidator discovered that Earl Jones had defrauded the Estate, as well as his many other clients. The attorney had no knowledge or suspicion of Earl Jones’ fraudulent activities. The Estate lost $243,297.

The issue was whether the attorney who recommends someone he believes is honest and competent to an inexperienced client is liable for the fraud committed by the person he recommended. The Court of Appeal confirmed that the lawyer’s obligation in recommending another professional or service provider to a client is one of means. The standard is one of a competent, prudent and diligent lawyer.

In recommending someone to a client, especially an inexperienced one, the lawyer must act diligently. The Court stated:

[20] …Dans ce contexte, la recommandation formulée par l’avocat a d'autant de poids que le client est sans expérience. Si l’avocat ne cautionne pas pour autant les actions que pourrait poser la personne-ressource qu’il recommande, il doit néanmoins faire preuve de diligence lorsqu’il formule sa recommandation. Celle-ci ne doit pas être faite à l’aveuglette. Elle doit reposer sur une certaine connaissance de la personne recommandée. 
[21] Dans le jugement entrepris, l’accent est mis sur le fait que les manœuvres frauduleuses n’étaient pas connues de l’avocat au moment où celui-ci a formulé sa recommandation. Ce constat est exact, mais l’analyse de la faute est incomplète. Bien sûr, il importe de savoir que l’intimé ne connaissait rien de la face cachée d’Earl Jones, mais il faut s’attendre à plus du professionnel qui réfère un client à une autre personne pour exécuter une partie du mandat que ce dernier comptait lui confier ou pour assurer certains services. Son obligation, faut-il le rappeler, n’en est toutefois pas une de résultat, mais de moyens dans ces circonstances. 
[22] … L’avocat qui, comme en l’espèce, recommande de consulter une autre personne doit avoir la conviction que cette personne est compétente pour remplir adéquatement le mandat dont il est question. Sa conviction doit reposer sur une connaissance raisonnablement éclairée de la personne recommandée. En cette matière, tout est affaire de circonstances. 
[23] Il demeure néanmoins qu’il appartenait à l’appelante de prouver que l’avocat a été négligent, qu’il a failli à son obligation de moyens. Il ne s’opère pas de renversement de fardeau de preuve du seul fait que le client établit que les services rendus par le tiers recommandé se sont avérés insatisfaisants ou, comme en l’espèce, désastreux. 
[25] L’intimé connaissait peu, il est vrai, M. Jones, sinon par sa réputation qui, jusque-là, était sans tache. Sa perception favorable de ce dernier reposait sur l’opinion exprimée par quelques personnes ou clients qui avaient témoigné de leur satisfaction ou qui avaient eu une expérience heureuse en faisant affaire avec lui dans le passé. Dans un cas, sa référence remontait à plusieurs années, mais dans un autre, l’information était plus contemporaine à sa recommendation. [...] 
[27] L’avocat ne savait évidemment rien, à l’époque où il donne son conseil et formule sa recommandation, de ce qui allait être découvert par la suite et n’avait aucune raison de soupçonner sa malhonnêteté. Les manœuvres frauduleuses d’Earl Jones furent éventuellement mises au jour, mais, malheureusement, non avant que ce dernier eût causé un préjudice sérieux à la Succession et ses légataires. 
[28] L’intimé, consulté par le liquidateur inexpérimenté de la Succession de feu Ralph Harris, dont les légataires étaient vulnérables compte tenu de leurs limitations intellectuelles, n’a pas commis de faute engageant sa responsabilité en recommandant au liquidateur initial de la Succession de faire appel aux services d’Earl Jones pour l’assister dans l’administration de celle-ci. Sans doute l’avocat aurait pu mettre à jour ses informations sur la qualité des services de M. Jones, mais rien n’indique dans la preuve que, l’eût-il fait, il aurait appris autre chose que ce qu’il connaissait des services que rendait ce dernier en matière d’administration de successions. Il faut éviter ici de juger du conseil de l’avocat et de sa recommandation à la lumière des faits découverts subséquemment. [...] 
[30] Le conseil que l’intimé prodigue au liquidateur de la Succession de s’adjoindre, à moindre coût que celui d’un avocat, les services d’une firme spécialisée dans l’administration courante d’une succession, est, en soi, judicieux. Bien qu’une autre recommandation eût pu être tout aussi appropriée, sinon davantage, la responsabilité du professionnel qui, de bonne foi et de manière tout à fait désintéressée, formule la recommandation de consulter une ressource spécialisée qui lui paraît mieux adaptée dans les circonstances et dont la réputation était, jusque-là, irréprochable, n’est pas pour autant engagée.

**Please note that Janet Michelin was the lawyer representing the Respondent in this file.

Tuesday 26 January 2016

ELENI YIANNAKIS SE JOINT À IMK



Eleni Yiannakis s'est jointe à IMK en 2016. Elle pratique en litige commercial et corporatif. Sa pratique couvre les litiges relevant du droit commercial, notamment les recours collectifs, les injonctions, les différends contractuels, les différends entre actionnaires et les recours en cas d'abus, ainsi que les domaines de la faillite et de l'insolvabilité.
Eleni est intervenue dans le cadre d'actions et de procédures introduites devant divers tribunaux, y compris la Cour supérieure du Québec, la Cour d'appel du Québec et plusieurs tribunaux d'arbitrage.
Sa vaste expérience comprend des causes complexes ayant nécessité une production importante de documents. Au cours de sa pratique, elle a eu l'occasion de participer à bon nombre de procès longs, au cours desquels elle a mis à contribution ses solides compétences au chapitre de la gestion de dossiers de litige volumineux et compliqués.
Eleni privilégie une saine gestion de projet de litige, laquelle comporte la formulation préalable d'une stratégie de litige efficace et l'élaboration d'un budget détaillé, afin de favoriser la réalisation d'économies et l'atteinte de résultats optimaux pour ses clients.
Elle enseigne aussi le cours d'obligations à l'École du Barreau depuis 2007.

expériences récentes
·        ·        a représenté TransCanada dans le cadre d'une injonction prise par des groupes environnementaux pour faire cesser des travaux géotechniques à Cacouna. (Centre québécois du droit de l'environnement c. Oléoduc Énergie Est Ltée, 2014 QCCS4147, 2014 QCCS 4398)
·       ·          a représenté Rogers dans le cadre d'un recours collectif sur les frais d'itinérance (Sibiga c. Fido Solutions Inc., 2014 QCCS 3235)
·      ·           a représenté Dimedia dans une poursuite/injonction contre Renaud-Bray pour bris de contrat (Dimedia c. Renaud-Bray, 2014 QCCS 2670)
·      ·           a représenté UPS dans le cadre d'un recours collectif pour des frais de courtage (Leblanc c. UPS, 2012 QCCS 4619, Gauthier c. UPS, 2013 QCCS 1212)
·      ·           a représenté Bixi dans le cadre d'une injonction et recours en dommages (8D Technologies c. SVLS, 2012 QCCS 4339)

Friday 22 January 2016

LEGAL COSTS: The Superior Court Confirms which Procedural Rules Apply

by Emma Lambert

As we are now all aware, under the New Code of Civil Procedure, chapter C-25.01 (“N.C.C.P.”), which entered into force on January 1, 2016, the Tariff of judicial fees of advocates (the “Tariff”) has been rescinded (article 832 N.C.C.P.), the distinction between “honoraires judiciaires” and “honoraires extrajudiciaires” has been eliminated and article 339 N.C.C.P. now provides an exhaustive list of all legal costs that can be claimed by a successful party to an action.

Going forward, according to article 339 N.C.C.P., the only legal costs that can be claimed include:

  • court costs and fees, including disbursements incurred for the physical preparation of appeal briefs and memorandums;
  • professional fees and expenses for the service or notification of pleadings and documents;
  •  witness indemnities and allowances;
  •  interpreter fees;
  •  fees for registration in the land register or the register of personal and movable real rights;
  • costs related to taking and transcribing testimony filed in the court record, “if that was necessary”; and
  • expert fees “related to the drafting of a report and, if applicable, preparing testimony, and remuneration for the time spent testifying and, to the extent useful, attending the trial”.

In the months leading up to January 1, 2016, many were concerned about the transition and how their costs awards would be treated going forward. This was especially true regarding all first instance judgments rendered before 2016 that were currently under appeal with large costs awards stemming from the application of the additional fee of 1% under s. 42 of the Tariff.

On January 12, 2016, in the decision of AlSammour c. Jmour, 2016 QCCS 46, the Honourable Serge Gaudet J.C.S. provided confirmation as to which set of rules apply to costs awards. Broadly, the case involved an action for unpaid wages and damages as well as an action for repayment of a loan following a breakdown in the relationship between the parties in connection with the failure of their café business. By way of a footnote at the end of the judgment, Justice Gaudet outlined the following comments with respect to legal costs awards in the context of this procedural transition:

Le Nouveau code de procédure civile étant d’application immédiate (sauf exceptions ici inapplicables), même si le procès a eu lieu et l’affaire a été prise en délibéré avant le 1er janvier 2016, le Tribunal ne peut plus accorder les dépens de l’ancien article 477 C.p.c, et doit plutôt accorder, s’il y a lieu, les frais de justice selon l’article 339 du Nouveau code de procédure civile. En effet, les dépens ou les frais de justice ne se gagnent pas au fur et à mesure que l’instance se déroule, mais plutôt par le jugement qui les accorde (cf. à cet égard le texte des articles 481 de l’ancien Code de procédure civile et 343 du Nouveau code de procédure civile). C’est donc le droit en vigueur au jour du jugement qui détermine le droit applicable en cette matière (cf. P. Roubier, Le droit transitoire, 2e édition, Dalloz, 1993, p. 563 : « La loi qui règle les formes et les effets du jugement est la loi du jour du jugement… »).

As such, it is clear (for now) that it is the procedural rules in force at the time of the judgment awarding the legal costs that govern.

Thursday 21 January 2016

Benchmark Litigation Nominations!



IMK is proud to announce that Doug Mitchell has been nominated in the category of Litigator of the Year (Quebec) by Benchmark Litigation and that IMK has been nominated in the category of Firm of the Year (Quebec). Awards will be presented on February 18, 2016 in Toronto.

Tuesday 19 January 2016

New Regulations in Court of Appeal – Beware of the 10-page limit!


By Audrey Boctor


The Court of Appeal has adopted new Civil Practice Regulations which came into force on January 14, 2016.  Of note are Rules 27 and 59 that limit all Notices of Appeal / Demandes d'appel (formerly the inscription in appeal) and all “Applications in the Course of a Proceeding” / “Demandes en cours d'instance” (Motions) to 10 pages.

We understand that the Court of Appeal has taken the position that this covers all applications / demandes that are made to the Court, including Applications for Leave to Appeal. The page limit includes the conclusions to the notice or application, even if they are lengthy. The Court has refused filings that exceed 10 pages. 


Those waiting until the last day to file should be particularly vigilant regarding these new Regulations, since article 353 of the new Code of Civil Procedure specifies that “[T]he time limits for appeal are strict time limits, and the right to appeal is forfeited on their expiry.”



Friday 15 January 2016

Recours collectif : l’inaction sanctionnée

Par Jean-Michel Boudreau

Le requérant qui cherche à obtenir l’autorisation d’exercer une action collective doit prendre garde de verser dans l’immobilisme. En effet, dans l’affaire Cohen c. LG Chem Ltd., (CSM : 500-06-000632-121, 18 décembre 2015), M. Jordan Cohen s’est vu remplacé à titre de requérant au stade de l’autorisation.

En vertu de la règle appliquée au Québec depuis l’arrêt Hotte c. Servier Canada inc., [1999] R.J.Q. 2598 (C.A.), M. Cohen (représenté par Consumer Law Group) ayant été le premier à déposer sa demande d’autorisation pour exercer un  recours collectif contre les manufacturiers de batteries au lithium, sa requête a préséance sur toute autre requête qui viserait à représenter le même groupe. Toutefois, en décembre dernier, la Cour supérieure lui a retiré ce statut privilégié pour lui substituer d’autres requérants, soit M. Patrick Dumoulin et Option consommateurs (représentés par Belleau Lapointe).

S’appuyant sur l’article 1024 de l’ancien Code de procédure civile (voir l’article 589 du nouveau C.p.c.), lequel s’applique également, selon le Tribunal, au stade de l’autorisation en vertu de l’article 1010.1 A.C.p.c., la juge Claudine Roy décide qu’il est justifié, dans les circonstances, d’autoriser un nouveau requérant à agir pour les membres au stade de l’autorisation, puisque M. Cohen ne s’est pas acquitté de sa tâche et s’avère incapable de représenter adéquatement les membres.

La juge Roy note l’avancement limité du dossier depuis le dépôt des procédures en novembre 2012 et le refus de M. Cohen de faire progresser le dossier malgré les avertissements répétés du Tribunal. Elle écrit : « [M. Cohen] empêche le recours d’avancer depuis trois ans et prétend tenter de négocier un règlement au nom des membres. Cette façon de procéder est fautive ». La juge Roy rappelle qu’il est contraire aux intérêts des membres de déposer des procédures dans le but d’occuper le terrain sans réelle intention de faire entendre la cause au Québec, en attendant simplement qu’un recours semblable soit tranché dans une juridiction étrangère. Le Tribunal conclut ainsi :

[69]     La preuve démontre qu’il est impossible que l’affaire survive équitablement si les membres continuent d’être représentés par M. Cohen. Cette preuve démontre que M. Cohen tente uniquement d’occuper le terrain, en attendant un dénouement du recours américain ou du recours ontarien. 
[70]     Certes, il n’est pas nécessaire que le représentant soit le meilleur représentant possible, mais ici, le Tribunal ne peut que constater le manque de motivation de M. Cohen et la façon inadéquate de procéder de son avocat.

[71]     M. Cohen ne défend pas les intérêts des membres du groupe. Il n’y a aucun avantage pour les membres à ne pas faire entendre la requête en autorisation. M. Cohen n’est pas ce mandataire par qui les membres accepteraient d’être représentés si la demande était formée selon l’article 59 C.p.c. 
[72]     À tous les motifs déjà énoncés, le Tribunal ajoute que l’article 4.1 C.p.c. exige que les parties agissent de manière raisonnable dans la conduite de leur dossier. M. Cohen agit ici de manière déraisonnable. 
[73]     Il n’a pas fait avancer son dossier depuis trois ans. Il n’a pas la motivation nécessaire pour poursuivre. Il n’a pas la capacité d’assurer une représentation adéquate des membres. 

Friday 8 January 2016

SERVICE IN APPEAL: Make Sure You Know Who to Send Your Proceedings To!

by Catherine McKenzie


In the coming months, we will be reporting on decisions related to the changes the new Civil Code of Procedure as they become available. First up is the Court of Appeal's decision in 9256-0929 Québec inc. v. Turcot (2015 QCCA 241) from earlier this year, which while decided under the old CCP is relevant on the issue of service for the new CCP.

At issue in that case was whether the motion for permission to appeal had been validly served. The Appellant had served the Motion on the Respondent's attorneys in first instance by fax. The Appellant argued that this was not valid service since it had not been served on the opposing party personally as required by art. 494 CCP. Justice Savard rejected that contention:

[5] La procureure des intimés a raison de souligner que le Code de procédure civile distingue les formalités de signification d’une demande pour permission d’appeler et d’une inscription en appel. En vertu de l’article 495 C.p.c., l’inscription en appel doit être signifiée à la partie adverse ou à son procureur, tandis que, selon l’article 494 C.p.c., la demande pour permission d’appeler doit être signifiée à la partie adverse. La doctrine n’explique pas cette distinction et les parties n’ont recensé aucune décision sur cette question.

[6] L’article 499 C.p.c. énonce que, avant la comparution au greffe des appels, les actes de procédure peuvent, en certaines circonstances, être signifiés au procureur qui représentait l’intimé en première instance :
499. L'intimé doit produire un acte de comparution au greffe des appels dans les 10 jours qui suivent la réception de l'inscription par ce greffe ou, suivant le cas, dans les 10 jours qui suivent la réception par l'intimé de la copie du jugement autorisant l'appel.


Avant cette comparution, les actes de procédure destinés à l'intimé peuvent être signifiés au procureur qui représentait l'intimé en première instance, à moins d'une disposition qui exige la signification à la partie elle-même.

[Je souligne]

499. Within 10 days following receipt at the Appeals Office of the inscription or, as the case may be, within 10 days following receipt by the respondent of the copy of the judgment authorizing the appeal, the respondent must file a written appearance with the Appeals Office.

Before such appearance, the proceedings intended for the respondent may be served upon the attorney who represented the respondent in the court of first instance, failing a provision of law which requires service on the party himself.
[7] Selon le premier alinéa, cette règle vise les dossiers formés par une inscription en appel et ceux qui découlent d’une permission d’appeler. Dans le premier cas, c’est le dépôt de l’inscription au greffe de première instance qui enclenche le processus d’appel et qui rend applicables les règles de procédure propres à l’appel[1]. Dans le deuxième cas, c’est le jugement qui autorise l’appel qui tient lieu de l’inscription en appel (art. 494, al. 4 C.p.c.). Vu le libellé du premier alinéa, l’application du second alinéa de l’article 499 C.p.c. me semble limitée aux seuls actes de procédure déposés une fois le processus d’appel enclenché et ne vise donc pas la requête pour permission d’appeler.

[8]  Dans ce dernier cas, soit avant que le processus d’appel ne soit enclenché, je suis d’avis que l’article 78 C.p.c. trouve application. Cet article, que l’on retrouve au chapitre des règles générales de la procédure écrite, énonce :
78. À moins d'une disposition contrairetout acte de procédure d'une partie doit être signifié aux procureurs des autres parties, ou aux parties elles-mêmes si elles n'ont pas de procureur, sans quoi il ne peut être régulièrement produit; s'il contient une demande qui doit être présentée à un juge ou au tribunal, il doit être accompagné d'un avis de la date de cette présentation, et la signification doit en avoir été faite au moins un jour juridique franc avant cette date sauf au cas d'urgence où le juge peut abréger le délai.


[Je souligne]

78. Failing provision to the contrary, any written proceeding of a party must be served upon the attorneys of the other parties, or upon the parties themselves if they have no attorney, otherwise it cannot be regularly filed; if it contains a demand which must be presented to a judge or to the court, it must be accompanied by a notice of the date of such presentation, and the service must have been made at least one clear juridical day before such date, except in a case of urgency when the judge may allow a shorter time.
[...]
[9] Notons que le juge Hilton, dans un autre contexte, a lui aussi renvoyé aux formalités prévues à l’article 78 C.p.c. alors qu’il analyse la date de production d’une requête pour permission d’appeler. Il écrit :

[15] I frankly doubt that even the Court could adopt a rule of practice to the same effect as the Registry’s practice, let alone the Registry itself, since to do so is in conflict with what the Code of Civil Procedure provides. Accordingly, the Registry must henceforth apply the requirements for the service and filing of written proceedings in compliance with the requirements of article 78 C.C.P. and, where it is sought to file motions for leave to appeal, with the third paragraph of article 494 C.C.P.[2]

[Je souligne]

[10] Selon moi, on ne peut interpréter l’article 494 C.p.c. comme constituant « une disposition contraire » au sens de l’article 78 C.p.c. qui obligerait la signification à la partie elle-même de la requête pour permission d’appeler.

[11] D’abord, en matière de déchéance de droit, il est raisonnable d’interpréter les dispositions du Code de procédure civile de manière à protéger les droits du justiciable[3].

[12] Ensuite, dans Proulx c. Côté[4], la Cour décide qu’une requête en rétractation de jugement en vertu de l’article 484 C.p.c. peut être valablement signifiée aux procureurs de la partie bien qu’il énonce qu’une telle requête doit être signifiée « à toutes les parties en cause ». Selon le juge Mayrand, seule la mention d’une signification « à la partie elle-même »[5] aurait constitué une « disposition contraire » au sens de l’article 78 C.p.c. Il ajoute :

[…] Il ne serait pas logique d’être plus exigeant pour reprendre un procès en partie que pour en appeler de ce jugement. Or, l’inscription en appel peut être signifiée à l’avocat plutôt qu’à la partie (C.p.c., art. 495, 1er alinéa).

[13] La même logique s’applique à l’égard de la requête pour permission d’appeler : rien ne justifie d’être plus exigeant pour requérir une permission d’appeler que pour en appeler de plein droit d’un jugement, d’autant que cela ne cause aucun préjudice.

[14] Le fait que l’article 494 C.p.c. limite la signification de la requête pour permission d’appeler « à la partie adverse » alors que l’article 495 C.p.c. permet la signification de l’inscription en appel « à la partie adverse ou à son procureur » n’est pas incompatible avec une telle conclusion et, compte tenu de l’ensemble des textes, on ne peut y voir qu’une inattention du législateur.

[15] Également, je ne peux retenir l’argument de la procureure des intimés voulant que la requête pour permission d’appeler soit assimilée à une requête introductive d’instance; ce n’est pas la requête qui tient lieu d’inscription d’appel, mais le jugement autorisant l’appel (art. 494, al. 4 C.p.c.). Elle ne constitue pas la « requête introductive d’instance » de l’appel. Dès lors, sans me prononcer sur son bien-fondé, la jurisprudence citée par la procureure des intimées selon laquelle une requête introductive d’instance ne peut être signifiée au procureur d’une partie par télécopieur n’est d’aucun secours[6].

[16] Je terminerai cette section en soulignant que la distinction actuelle entre les formalités de signification prévues aux articles 494 et 495 C.p.c. ne tiendra plus sous le nouveau Code de procédure civile puisque l’article 358 prévoit que, tant la déclaration d’appel que la demande de permission d’appeler, devront être signifiées à l’intimé et notifiées à l’avocat qui le représentait en première instance :


358. La déclaration d’appel, y compris, le cas échéant, la demande de permission, est signifiée à l’intimé et notifiée à l’avocat qui le représentait en première instance avant l’expiration du délai d’appel. Elle est également notifiée dans ce même délai aux personnes intéressées à l’appel à titre d’intervenant ou de mis en cause.
358. The notice of appeal, including, if applicable, the application for leave to appeal, is served on the respondent and notified to the lawyer who represented the respondent in first instance before the expiry of the time limit for appeal. It is also notified, before the expiry of that time limit, to persons with an interest in the appeal as intervenors or impleaded parties.
[Our emphasis] 
[...]

So the lesson for the new code: all originating procedures in appeal must be served on the respondent (and service means served by bailiff) and notified to the opposing counsel (by fax or by otherwise) if there is one.



[1]     Watier c. Watier, [1990] R.D.J. 364, 370 (C.A.).
[2]     Droit de la famille – 132870, 2013 QCCA 1797 (j. Hilton).
[3]     Denis Ferland et Benoît Émery, Précis de procédure civile du Québec, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais, 2003, p. 60.
[4]     Proulx c. Côté, [1978] C.A. 536.
[5]     L’article 407 C.p.c. est un exemple d’une telle disposition.
[6]     Chambre des huissiers de justice du Québec c. Milunovic, 2010 QCCQ 3516; Ghanotakis c. Clôt et Associés, 2006 QCCQ 13638.


Nouveau Code de procédure civile : une requête introductive d’instance signifiée avant le 1er janvier 2016, mais présentable après, est-elle assujettie au nouveau protocole d’instance ? La réponse est non.

Par Raphael Lescop

Selon l’article 833 al. 2 du Nouveau Code de procédure civile, le « Code est, dès son entrée en vigueur, d'application immédiate ». Toutefois, ce principe est assujetti à des exceptions, la première concernant les ententes sur le déroulement de l’instance. Ainsi, selon l’article 833, al. 2 par. 1 « en première instance, les demandes introductives d'instance déjà déposées demeurent régies par la loi ancienne en ce qui concerne uniquement l'entente sur le déroulement de l'instance et sa présentation au tribunal et les délais pour y procéder ».

Dans le nouvel ouvrage des Éditions Yvon Blais sur le Nouveau Code de procédure civile, Le Grand Collectif, vol. 2, à la p. 2911, on indique que cette disposition signifie que « les demandes introductives d’instance déposées avant l’entrée en vigueur du nouveau Code sont régies par les anciennes dispositions uniquement quant au contenu de l’entente, au délai pour en convenir et au délai pour la présentation de la demande introductive d’instance ».

Le 5 janvier 2015, la juge Claudine Roy a eu à déterminer si une requête introductive d’instance déposée le 2 décembre 2015, mais présentable le 5 janvier 2016, était assujettie au nouveau protocole de l’entente ou si les parties pouvaient déposer une entente sur le déroulement de l’instance établies selon les règles de l’ancien Code de procédure civile. Appliquant l’article 833 al. 2, par. 1 N.C.p.c., la juge Roy conclut qu’elle était autorisée à entériner une entente sur le déroulement de l’instance. Elle écrit ce qui suit dans  Poppy Industries Canada inc. c. Diva Delights Ltd, C.S. 500-17-091675-150, 5 janvier 2016 :

CONSIDÉRANT que l’art. 833 du Nouveau Code de procédure civile prévoit au premier paragraphe du deuxième alinéa, que les demandes introductives d’instance déjà déposées demeurent régies par la loi ancienne, en ce qui concerne l’entente sur le déroulement de l’instance et sa présentation; considérant que la demande a été déposée le 2 décembre 2015, qu’il s’agit d’une première présentation, et que cette présentation respecte les délais.

ENTÉRINE l’entente sur le déroulement de l’instance signée le 5 janvier 2015 et ordonne aux parties de s’y conformer.

Dans son jugement, la juge Roy semble toutefois insister sur le fait qu’il s’agisse de la première entente conclue par les parties, par opposition à une deuxième ou une troisième entente présentée au tribunal après le 1er janvier 2016 dans le cadre d’une requête pour prolongation du délai d’inscription. À la lumière de ce jugement, il n’est donc pas certain si les parties qui demandent une prolongation du délai d’inscription d’un dossier déjà entamé sous l’ancien Code de procédure civile doivent, ou non, présenter au tribunal une entente sur le déroulement de l’instance amendée ou un protocole d’instance.

Les tribunaux répondront certainement très rapidement à cette question.

Nous croyons toutefois que le jugement de la juge Roy devrait s’appliquer non seulement aux dossiers dont c’est le premier échéancier qui est produit, mais également à ceux déjà entamés sous l’ancien Code de procédure civile. En effet, nous voyons difficilement comment on pourrait justifier que des parties dont ils restent une seule échéance à accomplir à leur entente sur le déroulement de l’instance avant l’inscription et qui demandent une prolongation de délai après le 1er janvier 2016 devraient être tenues de préparer un protocole d’instance, alors les parties dont c’est la première entente sur le déroulement de l’instance n’ont pas à le faire. Nous trouvons appui à cette position notamment dans le régime même du protocole d’instance prévu aux articles 148 à 152 N.C.p.c. qui prévoit que le protocole d’instance est négocié et est établi par les parties au début d’un dossier, qu’il est produit au tribunal dans les 45 jours de l’avis d’assignation initial et qu’il est examiné dans les 20 jours suivants par le tribunal qui choisit de l’entériner ou de convoquer les parties. Certes, il est possible dans le cadre d’un avis de gestion de demander au tribunal de modifier le protocole d’instance, mais encore faut-il qu’il y ait un protocole d’instance qui ait d’abord été négocié et établi au tout début du dossier conformément aux articles 148 à 152 N.C.p.c. Or, tel n’est pas le cas des dossiers déjà entamés sous l’ancien Code de procédure civile et qui, par exemple, requièrent une prolongation d’un mois supplémentaire de l’entente sur le déroulement de l’instance, entre le 15 janvier 2016 et le 15 févier 2016, afin d’obtenir des réponses à des engagements souscrits lors d’un interrogatoire préalable.